Le caractère mensonger des prospectus publicitaires
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L’analyse
ci-après, réalisée par les spécialistes du CLAB, constitue la démonstration
méthodique, irréfutable et définitive de la volonté de la Caisse d’Épargne, en position de conflit d’intérêts, de tromper
ses clients au moyen des prospectus publicitaires des FCP Doubl’Ô. Les principaux prospectus publicitaires de la Caisse
d'épargne Une argumentation tendancieuse, focalisée sur les seuls
avantages Le nom commercial du produit : « Doubl’Ô » Le caractère fallacieux du slogan « Doublez votre
capital en toute sérénité » Le caractère abusif et mensonger du qualificatif « FCP haute
performance » La fausseté de l’affirmation « à fort potentiel de croissance » La tromperie sur la destination des capitaux collectés Les ambiguïtés, incohérences ou contradictions relevées
dans les notices publicitaires La malhonnêteté de ne pas présenter les caractéristiques dans le bon
ordre Les souscripteurs victimes d’un conflit d’intérêts |
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Rappel des sommes investies sur les FCP Doubl’Ô de la Caisse d'épargneDoubl’Ô (5 juillet 2001 – 5 juillet 2007) 475 millions d’euros (maxi) Soit un maximum de 2,5 milliards
d’euros. Dans un communiqué
du 21 juillet 2010 à l’AFP, les avocats Daniel Richard, Nicolas Lecoq-Vallon et Hélène Féron-Poloni
ont fait état d’un rapport de la DGCCRF pour publicité mensongère où les chiffres
officiels sont révélés : Les principaux prospectus publicitaires de la Caisse d'épargneProspectus édités par Écureuil Gestion, la filiale d’ingénierie financière de la CNCE, organe central de la Caisse d'épargne :- Doubl’Ô : dépliant en quadrichromie et 4 pages édité par Écureuil Gestion en mai 2001 (document). Ce dépliant porte la date limite de souscription du 5 juillet 2001. - Doubl’Ô Monde : dépliant en quadrichromie et 4 pages édité par Écureuil Gestion en septembre 2001 (document). Ce dépliant porte la date limite de souscription du 8 novembre 2001. - Doubl’Ô Monde 2, 3, 4 et 5 : dépliant en quadrichromie et 4 pages édité par Écureuil Gestion en décembre 2001 (document). Ce document ne porte pas de date limite de souscription et s’applique indifféremment à tous les FCP Doubl’Ô à partir de Doubl’Ô monde 2. - « À chacun l’épargne qui lui ressemble » Dépliant en quadrichromie et 6 pages édité par Écureuil Gestion en décembre 2001, faisant la promotion des divers produits proposés par la Caisse d’épargne, à savoir Nuances 3D, Quadreto et Doubl’Ô Monde en page 2 (document). Prospectus édités par certaines caisses régionales :Deux caisses régionales : la Caisse d'épargne Côte d’Azur et la Caisse d'épargne Île-de-France Ouest, se sont singularisées en éditant, en complément de ceux d’Écureuil Gestion, des prospectus publicitaires à leur image. Il s’agit d’initiatives ponctuelles et isolées, concernant dans les deux cas un seul FCP de la série. Il y a d’ailleurs très peu de différences sur la forme et sur le fond. Même format sur 4 pages, même présentation, le plan et les arguments sont strictement calqués sur ceux d’Écureuil Gestion. - Doubl’Ô :
dépliant en quadrichromie et 4 pages édité par la Caisse d'épargne Côte d’Azur en juin 2001 (document), - Doubl’Ô Monde 2 : dépliant en quadrichromie et 4 pages édité par la Caisse d'épargne Île-de-France Ouest en janvier 2002 (document). La responsabilité du produit et des prospectusQu’ils aient été réalisés et diffusés par Écureuil Gestion ou par les caisses régionales, tous les prospectus faisaient la promotion du même produit financier conçu et lancé par le Groupe Caisse d'épargne. Arborant la marque de fabrique, le logo et toute l’identité visuelle de la Caisse d’épargne, ils étaient l’émanation de tout le groupe bancaire en tant que personne morale. Il est clair que l’initiative
et le développement des produits financiers proposés à la clientèle
étaient du ressort exclusif de la CNCE, ainsi qu’elle le revendique
sans conteste possible dans les rapports annuels 2001
et 2002 :
« La Caisse Nationale des Caisses d’Epargne
(CNCE), organe central, joue un rôle majeur dans la conduite du projet stratégique.
…/… Elle développe les produits et services proposés à
la clientèle et coordonne la politique commerciale du réseau ». Les caisses régionales, simples
prestataires de services de vente dans la ligne stratégique fixée au niveau
central par la CNCE, ne peuvent être responsables. Elles ne sont intervenues ni
dans le développement du montage financier des FCP Doubl’Ô, ni dans
l’élaboration de l’argumentaire présenté dans les prospectus
publicitaires. Le mode
d’emploi de cet argumentaire et l’impact attendu étaient expliqués et
commentés dans des documents internes intitulés « Points clés pour vendre Doubl’Ô » réalisés par Écureuil Gestion à
l’usage exclusif des conseillers commerciaux. Il s’agissait de
directives et de techniques de vente dissimulées au public, visant à
doper la vente (par exemple au moyen du « phoning »,
démarchage téléphonique à domicile) pour obtenir un maximum de souscriptions
et atteindre les objectifs de placement fixés aux caisses régionales (Points
clé 1, Points
clés 2). L’objectif clairement affiché était de forcer « le transfert de l’épargne des ménages vers les marchés
financiers »
(beaucoup plus rémunérateurs pour la banque que les livrets sans risques) et
de vaincre pour cela la réticence des clients en usant au besoin de procédés
déloyaux, par exemple en ne leur laissant pas le temps de la réflexion
« un client
est toujours sensible au fait que l’on attire son attention sur un produit
intéressant pour lequel la période de souscription est limitée ». En tant que coordonnatrice de la politique commerciale du réseau la CNCE, agissant par sa filiale d’ingénierie financière et commerciale Écureuil Gestion, porte l’entière responsabilité des supports publicitaires et de tout le dispositif de vente imaginé et impulsé par cette entité. Le rôle d’ « organe central » dévolu à la CNCE lui conférait un devoir de contrôle sur les établissements affiliés, en particulier dans l’exercice de la communication vers le public. La CNCE en effet « veille à l’application des dispositions législatives et réglementaires propres à ces établissements » et elle a mission de « s’assurer du bon fonctionnement des établissements affiliés » (définition des missions et activités principales de la CNCE). La CNCE est responsable pour cela, non seulement des écrits publiés par sa filiale Écureuil Gestion qui agissait directement sous son autorité et selon ses directives, mais aussi de ceux réalisés par les caisses régionales sur lesquelles elle avait une obligation de surveillance et de contrôle interne. Depuis la fusion des deux groupes Caisses d'épargne et Banques populaires intervenue le 31 juillet 2009, l’établissement « BPCE », organe central du nouveau groupe bancaire, se substitue aux droits et obligations de l’ex CNCE selon la Loi n° 2009-715 du 18 juin 2009 qui a entériné la fusion. Les compétences du nouvel organe central sont notamment précisées à l’article L512-107 du Code monétaire et financier et sur le site Internet de l’organe central BPCE. Une argumentation tendancieuse, focalisée exclusivement sur de prétendus avantages• Pour assurer la promotion de chaque nouvelle édition du FCP Doubl’Ô – paré du qualificatif de « FCP original et innovant » –, Écureuil Gestion avait mis en place dans tout le réseau des Caisses d’épargne une campagne offensive et imprudente dont les excès apparaissent clairement dans les prospectus publicitaires cités plus haut. Assimilant un placement financier à un produit de grande consommation, les arguments de vente rejoignaient ceux d’une « nouvelle lessive qui lave plus blanc », donnant l’image factice d’un produit miracle pourvu de toutes les qualités. Ainsi, ne manquaient pas les expressions dithyrambiques telles que : « Vous investissez sur un panier d’actions composé de 12 valeurs spécialement sélectionnées pour leur potentiel de croissance. Ainsi votre capital grandit avec la hausse des actions du panier. La performance minimale attendue est de doubler votre capital ! » (Doubl’Ô, Caisse d'épargne Côte d’Azur, juin 2001) « Un placement innovant et original qui vous garantit les performances maximales en toute sécurité » (Doubl’Ô, Écureuil Gestion, mai 2001). • À l’inverse des prétendus avantages, le souscripteur n’était nullement informé sur les inconvénients ou les risques bien réels qui, selon les explications beaucoup moins réjouissantes révélées bien plus tard par la CNCE, étaient censés représenter la contrepartie ou le corollaire des avantages annoncés. La présentation succincte et excessivement élogieuse donnée dans les plaquettes publicitaires ne pouvait refléter que très imparfaitement les caractéristiques du produit, les possibilités réelles de rendement et les risques de perte. Bien au contraire, en sus du nom fallacieux de « Doubl’Ô », la focalisation sur le « doublement » du capital, « sans risque » et « en toute sérénité » n’incitait pas à la prudence qui doit pourtant présider à tout investissement boursier. La finalité de la publicité était à l’évidence d’emporter le consentement de clients qui, n’ayant jusqu’alors effectué que des placements sécuritaires, n’étaient aucunement avertis des inconvénients des placements en Bourse et auraient été réticents à ce type de placement en raison justement de la méconnaissance de ses risques et aléas. • On trouvait parfois cependant quelques mentions restrictives, reléguées le plus souvent en petits caractères dans un renvoi énigmatique, comme « sous réserve des conditions indiquées dans la notice COB disponible dans votre agence » ou « si aucune (des actions du panier) n’a enregistré de baisse de 40% par rapport à sa valeur initiale lors des dates d’arrêté de chacun des 8 derniers trimestres ». Il est clair qu’il ne fallait pas que l’attention du lecteur fût attirée sur ces réserves introduites de manière peu apparente par la banque dans le seul but de pouvoir s’y référer au besoin dans l’éventualité de contentieux ultérieurs. Minimisées, évasives et incomplètes, elles étaient rédigées pour que le souscripteur ne pût en deviner la portée ou les conséquences. Contrairement à la Caisse d'épargne, le souscripteur, en position d’infériorité, ne disposait d’aucun moyen lui permettant de quantifier le niveau de risque d’annulation du doublement annoncé. Il y avait en effet un fossé entre la probabilité infinitésimale de ce doublement et le gain quasi assuré promis par les prospectus et les conseillers commerciaux. • Dans la notice publicitaire du premier Doubl’Ô (document), un renvoi en bas de page apportait cependant quelque indication sur le calcul mathématique du rendement, difficilement accessible au commun des épargnants car assorti d’aucune représentation graphique ou chiffrée. Or on s’aperçoit que ce début d’explication, déjà insuffisant et ne renseignant aucunement sur la grandeur du risque, disparaîtra complètement des notices publicitaires éditées par Écureuil Gestion pour les cinq FCP Doubl’Ô Monde ultérieurs (Doubl’Ô Monde, Doubl’Ô Monde 2 à 5 ). Le nom commercial du produit : « Doubl’Ô »• Le nom commercial « Doubl’Ô », retenu par la Caisse d'épargne, matérialisait en lui-même et sans équivoque la perspective d’un doublement. Ce nom personnifiait le produit financier de la Caisse d'épargne, il en était l’emblème ou le blason. Il pouvait à ce titre être considéré par les épargnants comme le garant de la promesse ou de l’objectif annoncé. Chaque fois que le souscripteur pouvait avoir un doute, le nom Doubl’Ô le rassurait dans son illusion que le doublement était garanti. • Il est effectivement rapporté par tous les souscripteurs que, dès le moment de leur achat, le discours et le dispositif commercial les avaient convaincus que le doublement serait automatique au terme des six ans. En tout cas, cette croyance ne pouvait avoir été contredite ni tempérée par les exhortations des conseillers financiers ou les affirmations incitatives et péremptoires des notices publicitaires. • Par ailleurs, quand la Caisse d’épargne affirme aujourd’hui que le doublement était seulement un « objectif », elle se garde bien de préciser de quel point de vue elle se place, étant donné que l’objectif des souscripteurs et celui de la Caisse d’épargne étaient foncièrement antagonistes. En aucun cas la Caisse d'épargne ne pouvait favoriser la réussite du doublement des six FCP, dont la conséquence aurait été une perte immédiate de 2,13 milliards d’euros correspondant au versement à tous les souscripteurs d’un bonus équivalent au capital investi, et cela sans aucune compensation pour la banque. C’est bien la démonstration flagrante d’un conflit d’intérêts. • Il est aussi manifeste que l’objectif (pour ne pas dire la promesse) annoncé par les publicités d’obtenir « le doublement du capital en six ans en toute sérénité » était en totale discordance avec l’objectif imprécis et beaucoup moins attrayant inscrit dans la notice COB à savoir « L’objectif du Fonds est de garantir une valeur de remboursement minimum » (à la date d’échéance), incohérence réprouvée par l’arrêt du 24 juin 2008 de la Cour de Cassation. Le caractère fallacieux du slogan « Doublez votre capital en toute sérénité »•
On ne peut manquer de relever l’absurdité
voire la sottise du slogan « Doublez votre
capital en toute sérénité » lancé par Écureuil gestion dans le
dépliant commercial de décembre 2001 dévolu aux Doubl’Ô
2, 3, 4 et 5. La CNCE arguera que la notion de « sérénité » se référait à la garantie de retrouver son capital hors les frais. Outre le fait que retrouver moins que son capital au bout de six ans n’incite nullement un petit épargnant à la sérénité, il est indéniable que le terme « sérénité » dans le slogan « Doublez votre capital en toute sérénité » ne s’appliquait pas à la garantie du capital, mais à rien d’autre que le doublement. • L’illogisme sémantique de cette pseudo promesse en forme d’injonction entraînait le souscripteur à la comprendre dans le sens de : « Doublez votre capital en toute certitude ». C’était sans aucun doute le but recherché par la Caisse d'épargne quand elle a adopté sa formule choc qui suggérait un doublement automatique. • Il est significatif de constater la progression des slogans dithyrambiques, tous plus illusoires les uns que les autres, qui figuraient en gros caractères en première page des dépliants commerciaux : - « Un FCP innovant pour doubler
votre capital ou plus en toute sécurité. Bonne pioche garantie ! »
- « Doublez votre capital en six
ans ! » - « Unique ! La Caisse
d'épargne double votre épargne en six ans ! » - « Le FCP haute performance pour
doubler votre capital en toute sérénité » - « Doublez votre capital en
toute sérénité » - « Un placement boursier pour
doubler votre capital en toute sérénité » - « Placement haute performance,
votre capital doublé en 6 ans » • La juste et honnête formulation aurait dû être : « Risquez votre capital en toute sérénité », ce qui aurait correctement intégré la nature hasardeuse du produit. Le caractère abusif et mensonger du qualificatif « FCP haute performance »• Selon la définition trouvée dans tous les dictionnaires français, le terme « performance » mesure une valeur de résultat, qu’il s’agisse de la performance d’un sportif, de la performance d’une machine ou d’un processus quelconque visant un résultat dont la qualité peut être évaluée de manière objective. La performance se mesure donc forcément à l’arrivée et non au départ. • Il est par conséquent trompeur et abusif d’annoncer une performance quelconque avant le constat factuel du résultat, à moins d’avoir la certitude absolue du pronostic. Parler de « FCP haute performance » pour un produit qui ne portera ses fruits que dans six ans, c’est annoncer le résultat des courses avant que les chevaux soient partis. • La CNCE dira que le terme « haute performance » caractérisait le gain exceptionnel (le doublement du capital) que le souscripteur était susceptible d’obtenir sous certaines conditions assimilables à une loterie (non franchissement d’un seuil), imposées par la banque pour son propre avantage (elle avait tout intérêt à l’échec du doublement) et improbables au plus haut degré. La CNCE utilisait le terme « performance » dans le sens abusif de possibilité de résultat maximal, trompant le souscripteur qui était porté à croire à la réalité de la performance promise. La CNCE minimisait voire occultait sciemment et intentionnellement le caractère aléatoire et improbable du résultat annoncé. • En lisant l’annonce de « FCP haute performance », les souscripteurs n’avaient aucune raison de douter de la promesse d’une banque à la réputation historique en laquelle ils mettaient toute leur confiance. En aucun endroit des publicités la « performance » n’était tempérée de qualificatifs tels que : possible, envisagée, éventuelle, maximale, potentielle, espérée, incertaine, conditionnelle, hypothétique… ce qui aurait pu mettre en garde les épargnants. Il était écrit au contraire sur tous les prospectus « Vous doublez votre capital sans limite de performance » ce que l’on pouvait comprendre comme l’affirmation que le doublement était une performance a minima et que celle-ci pouvait être dépassée. • Dans les publicités, la Caisse d'épargne renforçait son affirmation du caractère assuré de la performance en dissertant à grand renfort d’arguties sur « Le secret de la performance Doubl’Ô Monde », se félicitant à l’avance, pouvait-on croire, d’un succès effectif et d’une promesse déjà tenue (Doubl’Ô Monde 2, 3, 4 et 5, Écureuil Gestion, décembre 2001). Outre l’effronterie révoltante d’un tel coup de bluff, elle se comportait comme si elle privilégiait les petits épargnants en leur révélant des secrets réservés au monde de la haute finance et aux clients fortunés, comble de l’hypocrisie. • Il est d’autant plus choquant de voir la Caisse d'épargne affirmer impunément que ses clients bénéficiaient d’avantages exceptionnels dès lors qu’elle savait pertinemment que le « rendement complémentaire », au-delà de la garantie du capital initial hors les frais, serait selon ses propres termes : « éventuel et limité » comme elle ne se prive pas de l’écrire aujourd’hui en pleine contradiction avec son discours du passé. En effet, dans ses échanges écrits avec les clients mécontents, la CNCE élude constamment la question de l’échec systématique par une formule lapidaire, gratuite et péremptoire qui voudrait faire admettre à propos de la garantie du capital (hors les frais) que : « La contrepartie de cette protection à l’encontre des aléas inhérents aux marchés boursiers résidait dans le fait qu’au-delà du capital investi, le rendement complémentaire éventuel susceptible d’être perçu par le client à l’échéance du fonds était limité et partiellement décorrélé des évolutions du marché en cas de croissance. » (assignation de la CNCE contre Noël HONGNE, page 3, alinéa 4), ou encore : « La contrepartie à cette absence totale d’aléas consiste dans la perception d’un rendement complémentaire éventuel limité et partiellement décorrélé des évolutions du marché en cas de croissance » (lettres du Service relation clientèle aux clients). • Outre le fait que la description du produit en ces nouveaux termes (notamment la « contrepartie » nullement évidente ni implicite de la protection du capital) ne figurait sur aucun document contractuel, pas même la notice COB, la banque n’offrait à ses clients (ce qu’elle avoue aujourd’hui seulement) rien d’autre que la certitude de retrouver l’investissement initial diminué de frais allant de 2,5% à 7% selon que la somme était placée sur un PEA ou une assurance vie. Si un « complément » de quelque sorte devait être dès le départ « éventuel et limité », le doublement a fortiori ne pouvait être qu’illusoire. • La formulation du slogan de la Caisse d’épargne n’aurait jamais dû promettre une performance mais il aurait dû être par exemple : « Le FCP à haut rendement potentiel » ce qui aurait intégré, quoique de manière imparfaite, la composante aléatoire du rendement possible du produit. La fausseté de l’affirmation « à fort potentiel de croissance »• La Caisse d’épargne voulait effacer la méfiance naturelle des souscripteurs à l’égard d’un placement boursier en affirmant dans les notices publicitaires que les douze actions du panier avaient été « rigoureusement sélectionnées » pour « leur exceptionnel potentiel de croissance » par les « experts financiers d’Écureuil Gestion ». • Il
s’agissait là d’une affirmation infondée et mensongère, aucune indication
n’étant donnée sur la méthode d’évaluation du potentiel de croissance. À
supposer que cela soit possible, une telle évaluation repose comme chacun sait
sur des critères non scientifiques, fortement subjectifs, et soumis à de
nombreuses incertitudes. • La Caisse d’épargne demandait à ses clients de la croire sur parole, sur la seule foi de « son expertise reconnue » autoproclamée par elle. (publicité 1, publicité 2, publicité 3). • Qui plus est, en affirmant qu’elle mettait toute la compétence et le savoir-faire de ses experts financiers au service de ses clients et de leurs intérêts en premier lieu, la Caisse d’épargne commettait un mensonge éhonté quand on sait que, de par sa conception même, un fonds à formule induit un conflit structurel d’intérêts entre la banque et les souscripteurs, en particulier chaque fois qu’il comporte un bonus fortement pénalisant pour la banque mais excessivement attractif pour les souscripteurs à seule fin de les appâter. • Le doublement annoncé du capital, déterminé par tout ou rien selon l’artifice de la formule fixée par le seul promoteur, ne correspondait pas à la redistribution d’une plus-value ou d’un bénéfice réel. Attribué à tous les souscripteurs sans exception, au même titre que le « gros lot » d’une loterie, il aurait dû être prélevé sur les fonds propres de la Caisse d’épargne. Il est impossible de croire qu’une banque se mette en danger de perdre une somme colossale de 2,13 milliards d’euros (total investi sur les six FCP Doubl’Ô) en prenant le moindre risque de devoir la verser sans compensation à 266 547 souscripteurs. • Il était exclu par conséquent que toutes les actions du panier puissent avoir été choisies pour leur « exceptionnel potentiel de croissance » étant donné qu’il suffisait qu’une seule d’entre elles, selon les conditions imposées par la Caisse d'épargne, baisse d’au moins 40% au terme de la quatrième année pour entraîner l’issue la plus pénalisante pour les souscripteurs. Cette observation est capitale quand on sait que la Caisse d'épargne, sans aucun contrôle externe et indépendant, avait l’entière maîtrise et l’exclusivité du choix de la formule et des actions y intervenant. Le souscripteur, privé d’informations objectives pour prendre sa décision, n’avait aucun moyen de savoir quelle était la finalité réelle et cachée du montage financier. • Or il est constaté que la baisse de 40% d’une action au moins est survenue à six reprises et chaque fois dès la première date de constatation, entraînant automatiquement l’échec du doublement et la rémunération la plus faible de toutes les éventualités possibles. Non seulement les investisseurs ne bénéficiaient pas même de l’évolution de la valeur boursière du panier (dont la progression éventuelle était drastiquement réduite à 60% de sa valeur constatée), mais encore ils perdaient tous les dividendes qu’ils auraient perçus chaque année s’ils avaient acheté les mêmes actions en leur nom propre pour les placer dans un compte titre ordinaire. • Si la Caisse d’épargne croit pouvoir se vanter dans sa publicité de posséder des experts financiers capables de faire « une sélection rigoureuse de 12 valeurs présentant un exceptionnel potentiel de croissance », elle ne peut nier que ces mêmes experts sont pareillement aptes (ce qui est beaucoup plus aisé) à trouver des actions caractérisées à l’inverse par un potentiel assuré de décroissance pour obtenir de façon certaine l’échec d’une formule de doublement dans un FCP. La conception même du produit oblige à douter de l’objectivité de la Caisse d'épargne entre un choix favorisant ses intérêts propres au détriment des souscripteurs et un autre favorisant les souscripteurs au détriment de ses intérêts propres. Or il fallait bien faire cet arbitrage puisque le principe même de la formule, partant de l’absence de tout lien de corrélation entre les rémunérations du promoteur et du souscripteur, excluait toute forme d’intérêts convergents. •
Le caractère spécieux de l’argument du
potentiel de croissance est encore mis en lumière par l’observation
suivante : il aurait été possible par exemple que les douze actions
du panier baissent toutes ensemble de 35% ou aux alentours de cette valeur.
En dépit de cette baisse drastique et uniforme, la Caisse d'épargne aurait dû quand même verser le doublement
puisque aucune des douze actions n’atteignait le seuil de -40%. Elle aurait
alors subi une perte considérable. Il fallait donc que le montage fût
programmé pour qu’une action au moins parmi les douze baisse à coup sûr de
40%. La tromperie sur la destination des capitaux collectés• En totale discordance avec la notice COB, en aucun endroit d’aucun prospectus publicitaire n’était indiqué que les capitaux collectés étaient destinés à constituer un portefeuille physique d’actions (exemple Doubl’Ô Monde 2) sans relation aucune avec le panier virtuel et illusoire vanté par la publicité. La banque se réservait à elle seule le revenu intégral de ce portefeuille physique (plus-values boursières et dividendes annuels) par l’entremise de son gestionnaire. Elle en reversait une partie substantielle à un établissement financier partenaire, bénéficiaire d’un contrat de swap, dont l’identité n’a jamais été révélée. • La publicité occultait par conséquent que la rémunération destinée aux souscripteurs au terme des six ans serait entièrement dissociée du revenu réel de leurs capitaux. Cette rémunération éventuelle (qui n’a eu lieu pour aucun des six placements) était artificiellement déterminée par l’application mécanique d’une formule mathématique concoctée par la Caisse d'épargne sur la base d’un panier virtuel de douze actions choisies par elle. C’est le principe des fonds à formule, produits financiers complexes et viciés qui, au prétexte d’une garantie du capital hors les frais, sont entachés de risques rédhibitoires en niveau de rendement, caractéristique systématiquement éludée lors de la commercialisation. Ces produits ne doivent être proposés qu’à des clients professionnels ou avertis et aptes à les comprendre (lesquels se gardent bien de les acheter). C’est pour rendre attractifs ces fonds inintelligibles aux néophytes coutumiers des placements sans risque, que les promoteurs font toujours miroiter la perspective d’un rendement alléchant prétendument assuré (en l’occurrence le doublement) sur lequel se focalise la publicité mais qui n’a en réalité aucune chance de se réaliser. • Dans la formule Doubl’Ô, la décorrélation structurelle des rémunérations respectives des souscripteurs d’une part, et de la banque d’autre part, par le principe de la formule, excluait toute possibilité d’intérêts convergents. C’est là le fondement du conflit d’intérêts. •
En totale incohérence avec la notice COB, le
qualificatif de « Fonds à formule »
et le mécanisme de rémunération n’apparaissaient jamais dans les
prospectus publicitaires. C’était pourtant la caractéristique
essentielle qui aurait pu alerter les souscripteurs. Au contraire, La
confusion avec un placement classique sur un portefeuille de 12 actions « soigneusement
sélectionnées » était habilement entretenue. • Il est facile de comprendre que la sélection du panier de référence, à la guise de la banque sous aucun contrôle, avait été soigneusement étudiée pour favoriser les seuls intérêts de cette dernière. Les jeux étaient faussés dès le départ et il n’existait durant six ans aucun moyen susceptible de redresser le résultat dans l’intérêt du souscripteur. La seule possibilité d’action pour celui-ci était de se retirer en augmentant ses pertes du fait des pénalités de sortie avant terme. Il s’agit clairement d’un jeu ou d’un pari truqué où les chances sont délibérément et gravement déséquilibrées par l’une des deux parties à l’insu de l’autre. • De manière mensongère, c’est autour du panier de 12 actions et de son « exceptionnel potentiel de croissance » que tout le discours commercial était articulé. La Caisse d’épargne trompait ses clients en leur faisant croire que le panier était le support d’investissement dont le potentiel de croissance allait produire la plus-value espérée. Tous les souscripteurs sans exception se sont laissé prendre à ce piège, sur la foi des publicités mensongères : - « Vous bénéficiez du potentiel de croissance de 12 grandes valeurs mondiales de la Bourse » (publicité 1, publicité 2, publicité 3) - « Des valeurs de croissance pour un panier dynamique » (publicité Doubl’Ô) - « Vous investissez sur un panier d’actions composé de 12 valeurs spécialement sélectionnées pour leur potentiel de croissance » (publicité Doubl’Ô Côte d’Azur) - « Une sélection rigoureuse de valeurs sûres » (publicité 2, publicité 3) - « …les experts de la Caisse d’épargne ont sélectionné 12 valeurs internationales présentant un potentiel exceptionnel de croissance » ou « …un fort potentiel de croissance » (publicité 2, publicité 3, publicité Île-de-France Ouest) - « La performance des meilleures valeurs. Vous bénéficiez
d’un potentiel de croissance exceptionnel lié à une diversification
géographique et sectorielle au travers d’une sélection des plus grandes
valeurs mondiales » • Loin de représenter le support d’investissement prometteur vanté par la Caisse d'épargne, le panier d’actions « dynamiques » vanté par la publicité était un leurre dont l’unique réalité était de déclencher l’invalidation du doublement selon la clause liée à la baisse d’au moins 40% d’une seule action parmi les douze. Or seule la Caisse d’épargne connaissait la probabilité de cet évènement puisque c’était sur la base de cet objectif, qui préservait à coup sûr les intérêts de la banque au détriment des souscripteurs, que la formule avait été mise au point par les ingénieurs financiers. • Au lieu de dire que les souscripteurs « investissaient » sur un panier de douze actions prétendument sélectionnées pour leur « fort potentiel de croissance », ce qui était manifestement faux et mensonger, la juste et honnête formulation aurait dû être : « Vous pariez sur le comportement favorable de chacune des douze actions choisies par la Caisse d’épargne ». Les ambiguïtés, incohérences ou contradictions relevées dans les notices publicitaires• En sus des abus de terminologie signalés plus haut, les dépliants publicitaires étaient semés de contradictions, d’ambiguïtés, d’incohérences qui ne manquaient pas de créer la confusion dans l’esprit des souscripteurs. On relève par exemple dans le prospectus Doubl’Ô Monde 2, 3, 4 et 5, édité par Écureuil Gestion en décembre 2001 : - « Quelle que soit l’évolution du panier d’actions,
Doubl’Ô Monde vous garantit la meilleure rémunération… »,
affirmation contredite quelques lignes plus bas par une annotation en tout
petits caractères : « Si aucune
d’entre elles n’a enregistré une baisse de 40%... ». - « Doubl’Ô Monde vous garantit la meilleure rémunération entre le doublement du capital et 100% de l’évolution du panier », déclaration qui rend incompréhensible la présence d’une autre mention trouvée quelques lignes plus loin : « vous êtes assuré de retrouver au minimum la valeur initiale du capital investi… ». Cette dernière assurance est en effet totalement surpassée par la première qui garantit au minimum le doublement du capital. L’assurance de retrouver son capital initial est manifestement superfétatoire si le doublement est garanti ou présenté comme tel. - Le doublement du capital est affirmé sans équivoque au premier des « 5 avantages de Doubl’Ô Monde » énoncés à la dernière page du prospectus : « Vous doublez votre capital sans limite de performance ». Cette mention apparaît sans aucune réserve, même par le moyen d’un astérisque. • La CNCE tente de se justifier en alléguant : « Il ne saurait être prétendu que lorsque l’assurance est donnée à un souscripteur de retrouver au minimum la valeur initiale du capital investi, il se voit promettre le doublement de son capital. Au demeurant, de telles garanties n’auraient pu être accordées concomitamment, la garantie du capital étant sans objet et parfaitement inutile si le doublement du capital est également garanti. Il résultait donc bien des termes de ces notices que la seule garantie offerte au souscripteur du fonds était de recouvrer son capital initial à l’échéance et que le versement d’une performance complémentaire était en revanche aléatoire et soumis aux aléas de l’évolution des marchés financiers. » (cf. § 6 de l’assignation de la CNCE contre M. Noël Hongne en sa page 4). Par de tels propos, la CNCE s’exonère de manière hâtive et désinvolte de son obligation d’informer clairement et loyalement les souscripteurs. Elle se décharge pour cela sur leur discernement et leur intelligence, c'est-à-dire leur capacité présumée à analyser, recouper les multiples propos énoncés dans les prospectus qui leur étaient remis, afin d’en clarifier et résoudre par eux-mêmes les multiples incohérences et contradictions. • Or il n’appartenait pas au souscripteur de procéder par lui-même à des interprétations, des recoupements, des déductions, des analyses sémantiques, en un mot à l’exégèse des termes de la publicité pour essayer, à supposer que cela fût possible, de débusquer et corriger les contradictions, imprécisions, incohérences qui pouvaient s’y trouver. Il eût été beaucoup plus simple et clair pour tout le monde, et cela était d’une extrême facilité pour la Caisse d’épargne si elle l’avait voulu, de supprimer tout risque de malentendu en écrivant explicitement dans les prospectus, comme la CNCE le fait aujourd’hui avec un retard coupable, qu’il n’y avait pas d’autre garantie que celle du capital investi hors les frais et que le rendement en sus du capital, en contrepartie de cette garantie, était « éventuel et limité ». Bien au contraire, la Caisse d’épargne s’est ingéniée à entretenir l’équivoque entre la garantie du capital initial (hors les frais) et celle de son doublement. Il en est résulté inévitablement que la quasi-totalité voire la totalité des souscripteurs ont cru de bonne foi à la promesse du doublement. • Il faut aussi s’interroger sur la véritable intention d’une mention en caractères microscopiques placée verticalement et presque indécelable sur le dépliant, indiquant « Document non contractuel » ce qui apparaît comme l’introduction insidieuse et illicite d’un déni de responsabilité sur la qualité des informations données par le prospectus. Même s’il s’agit d’une publicité, toutes les informations qui y figurent doivent être en parfaite cohérence avec les spécifications contractuelles comme l’a bien souligné l’arrêt du 24 juin 2008 de la Cour de Cassation. La malhonnêteté de ne pas présenter les caractéristiques dans le bon ordre• La logique ou le bon sens, dans la présentation d’un argumentaire, oblige à ordonner les propositions en fonction de leur importance et de leur étendue, c'est-à-dire en allant du principal au secondaire, du général au particulier. Le manquement à ce principe peut conduire à des incohérences ou des paradoxes propres à induire en erreur. • Il est aujourd’hui avéré que le principal voire le seul avantage des FCP Doubl’Ô était la garantie du capital hors les frais. En sus du capital initial, le produit commercialisé n’offrait en réalité, selon les révélations les plus tardives de la CNCE, qu’un « complément éventuel et limité ». En contradiction avec tout ce qui avait été annoncé
auparavant, la CNCE reconnaît donc maintenant que le doublement promis au
départ n’était en réalité qu’une possibilité subsidiaire et de surcroît
très incertaine. Cette volte face pour le moins incongrue de la Caisse
d’épargne, arrivant après le constat de six échecs successifs, montre bien
dans quel esprit les prospectus publicitaires avaient été rédigés, au mépris
des souscripteurs. • Ainsi, dans l’énumération des supposés avantages présentés dans la publicité, celui qui venait toujours en tête était le doublement du capital, formulé de diverses manières : « Vous doublez votre capital sans limite de performance » ou encore « Doubl’Ô Monde vous garantit la meilleure rémunération entre le doublement du capital et 100% de l’évolution du panier » (publicité). Le choix, contre toute logique, de placer avant tous les autres un avantage mirifique mais totalement hypothétique, à savoir le doublement du capital, était assurément concerté dans l’intention d’abuser les souscripteurs. Or c’est bien cet ordre de présentation qui est la cause des ambiguïtés et des incohérences soulignées plus haut. •
En troisième position seulement
arrivait la caractéristique – réellement
assurée celle-là – selon laquelle « Votre capital initial est garanti » ou encore « Vous êtes assuré de retrouver au minimum
la valeur initiale du capital investi ». Cependant le premier des
avantages – à savoir le doublement du capital – prévalant sur tous
les autres en raison de sa position en tête de liste, il en résultait que le souscripteur était conduit à
comprendre que son capital était automatiquement garanti du fait qu’il allait
doubler. • La Caisse d'épargne commettait par conséquent une faute et trompait délibérément ses clients en plaçant l’annonce du doublement en première position de la liste des prétendus avantages. Les souscripteurs victimes
d’un conflit d’intérêts
• Il résulte de ce qui précède que les prospectus publicitaires étaient réglés dans tous leurs détails pour jeter de la poudre aux yeux des souscripteurs, les induire en erreur et forcer leur décision en leur présentant l’image illusoire d’un produit financier miracle doué de tous les avantages. Ces publicités n’étaient en réalité qu’une accumulation de procédés mystificateurs, pour certains grossiers (typographie, formules choc...), et pour d’autres plus insidieux (énoncés ambigus, termes impropres, incohérences, contradictions…). • La Caisse d'épargne voudrait se voir blanchie et lavée de tout soupçon en invoquant certaines annotations faisant référence à la notice COB qu’il fallait aller demander dans les agences, notice agitée après coup comme un blanc-seing censé légitimer tromperies, abus et artifices. Non seulement ces renvois était minimisés, parfois à l’extrême, pour passer inaperçus dans les prospectus mais encore la notice COB ne suffisait pas à assurer la complète information du souscripteur dès lors que la publicité n’était pas en cohérence avec elle, comme en a statué la Cour de Cassation dans son arrêt du 24 juin 2008. • Il faut ajouter à cela que l’agrément donné par la COB (aujourd’hui AMF) se borne à constater la conformité purement formelle de la notice d’information aux normes de rédaction, de contenu et de présentation fixées par la réglementation de l’AMF, sans s’attacher à la finalité intime et cachée du modèle mathématique support du montage financier. Or la mécanique d’un FCP à formule, produit sophistiqué dérivé actions, est élaborée sur la base d’analyses statistiques et probabilistes minutieuses et complexes réalisées à l’initiative et sous la seule maîtrise des ingénieurs financiers de la banque dans le secret de leurs bureaux d’études (mission attribuée à Écureuil Gestion, ancienne filiale de la CNCE, organe central de la Caisse d'épargne), et cela sans aucune régulation par un organisme de contrôle externe et indépendant. Pour concevoir la formule qui déterminait artificiellement la rémunération finale des souscripteurs, de manière totalement décorrélée du revenu réel des sommes investies, les ingénieurs avaient le pouvoir de fixer à leur convenance les probabilités attachées aux différents niveaux de rendement annoncés ou susceptibles de se réaliser. Par un choix avisé des actions du panier et de leur poids dans la formule, il leur était facile de préserver l’intérêt de la banque et de tromper les souscripteurs en réduisant à un degré infime toute chance de réalisation des conditions du doublement. • Dès lors, le simple agrément de la notice d’information par l’AMF ne saurait valoir certification de la régularité du montage financier en lui-même au regard notamment de la loyauté d’un produit qui ressemblait davantage à un pari truqué entre deux joueurs qu’à un investissement en Bourse. La Caisse d’épargne, seule conceptrice de la formule et agissant tout à la fois comme arbitre et partie intéressée au résultat, détenait dans le secret de ses bureaux d’experts l’entière maîtrise du jeu. Elle pensait ainsi pouvoir l’orienter impunément en sa faveur car il n’existait aucune garantie d’équité entre le souscripteur et le promoteur. Bien au contraire, le conflit d’intérêts était majeur entre la banque et la communauté des épargnants. •
Tout comme dans la récente affaire Goldman
Sachs aux États-unis, la Caisse
d'épargne poussait ses clients à souscrire à un produit dérivé actions
en leur
recommandant ostensiblement « l’exceptionnel
potentiel de croissance des actions du panier », alors
qu’à l’inverse, selon les règles qu’elle avait elle-même définies et
imposées, elle
pariait en secret sur la baisse d’au moins 40% d’une ou de plusieurs de ces
mêmes actions, faute de quoi elle subissait une perte colossale
de 2,13 milliards d’euros pour les six FCP, éventualité impossible à
envisager par un établissement financier dont l’objectif inavoué mais notoire
est de maximiser ses profits. • Il est patent qu’en occultant le conflit d’intérêts à ses clients, la Caisse d’épargne manquait de manière flagrante à l’article L533-10 alinéa 3 du Code Monétaire et Financier (version imprimable) qui stipule : Les prestataires de
services d'investissement doivent : |
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